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Jizô - Des voyages en bande dessinée
25 octobre 2011

Transat - Aude Picault - Shampooing

          transat

 

 

Aude Picault, Transat, Shampooing, 2009

Face à la vie de la grande ville superficielle et abrutissante, le personnage féminin de cette bande dessinée décide de partir "une semaine sur une île en Bretagne et un mois ou plus en bateau", selon ses propres termes.

Ladite île bretonne, c'est un endroit (anonyme) où notre héroïne va vivre seule dans une maison parmi des moutons et des lapins. Elle va aussi rencontrer quelques personnes sur Stagadon (Finistère Nord), l'île sur laquelle le père Jaouen prend en charge des personnes en réinsertion en les initiant au rude monde de la voile et en restaurant la goélette Bel Espoir II. Le voyage d'un mois en bateau, c'est une croisière transatlantique sur un voilier (le Darwin), depuis le Cap-Vert jusqu'aux Caraïbes.

D'une manière assez audacieuse, cette traversée n'est pas racontée de long en large avec tous les problèmes, les interrogations et les difficultés qu'une telle aventure peut poser. Au contraire, elle est figurée en quatorze doubles pages, avec un minimum de textes et de dialogues, à l'aide d'une plume trempée d'encre noire qui veut tout dire : les vagues, les passages nuageux, la vitesse, les jours et les nuits, les milles impressions fugitives que l'on peut ressentir sur le pont d'un voilier en plein milieu de l'Atlantique.

Puis c'est l'arrivée aux Caraïbes et la découverte d'une vie à part, celle de vieux voileux post soixante-huitards qui ont préféré fuir le métro-boulot-dodo pour se la couler plus ou moins douce sous les tropiques. Une existence qui apparaît idyllique de premier abord, mais que notre héroïne finit rapidement par rejeter. En effet, elle a du mal à se plaire dans cet environnement assez machiste dont elle sent rapidement les limites. Elle comprend que le rêve de voile impose de nouvelles limites, de nouvelles oeillères. Elle se prend alors à vouloir retrouver son existence "jean-baskets manteau-bonnet" et pouvoir un peu "frimer devant les parisiens pâlots" avec ses histoires remplies d'absolu. Le déclic semble venir avec la rencontre d'un Normand grossier et alcoolique venu caréner son bateau dans le port où elle se trouve, et surtout de la prise en compte de sa propre "tropicalisation" : subir la torpeur des tropiques qui donne envie de faire la sieste, un engourdissement du corps et de l'esprit qui ne s'arrange pas "une fois que tu te mets au rhum". L'héroïne décide donc de "relancer le mouvement" et part retrouver la vie trépidante de la grande ville.

Dans cette bande dessinée, Aude Picault met d'une certaine manière en évidence la difficulté d'adaptation que tout un chacun peut éprouver devant un mode de vie nouveau. Après les moments de bonheur intenses procurés par la traversée (bien évidemment mêlés de difficultés, car la voile n'est pas toujours une partie de plaisir), elle s'est trouvée dans un monde très différent du sien, auquel elle n'a pas été préparée et qu'elle ne peut finalement que rejeter. Elle fait alors poser beaucoup de questions au lecteur qui rêverait de suivre son exemple, quelle que soit la destination : qu'est-ce que je cherche dans le voyage ? Et surtout : ce que je cherche se trouve-t-il au bout de mon périple ou plutôt dans le périple lui-même ? Et finalement, la question que tout l'humanité devrait se poser : puis-je trouver une félicité continuelle dans une activité ou une autre, c'est-à-dire, finalement : puis-je vivre dans une félicité perpétuelle ?

Ce que j'aime :

- La vision toujours très juste d'Aude Picault sur le monde qui l'entoure.

- Son humour.

- Son dessin simple mais précis.

Ce que j'aime moins :

-Les ellipses (même si elles sont audacieuses) à propos de la vie plus ou moins difficile sur un voilier.

- Les ellipses à propos du mode de vie de ces voileux post soixante-huitards aux Antilles.

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